Pas plus tard qu’il y a 4 ans, à mes débuts sur Facebook, et plus particulièrement mes débuts sur des groupes de professionnels de la filière marée, un poisson « pinsé » était un gage de qualité. Les poissonniers commercialisaient ce type de poissons valorisés d’un pin’s comme un graal. Ce pin’s mentionnais souvent, une zone de pêche, une méthode de pêche et plus souvent une pêche de ligne, voir le summum: un poisson IKEJIME. Très peu de poissons méritaient d’être pinsés. La rareté de ce poisson sur les étals démontrait à la clientèle, un poisson d’excellente, un poisson « DIOR ». C’est une toute autre histoire aujourd’hui…
Certains mareyeurs, industriels flairant le bon coup, voyant que le poissonnier adhère tout et n’importe quoi pourvu que cela fasse vendre toujours plus, ont commencé à « pinser » une très grande partie de leur produit.
Alors bien sûr une grande majorité des produits « pinsés » sont réellement de bon produits, issus d’une pêche responsable, d’une peche à la ligne… mais dans tout cela, on glisse par ci par là, de la marchandise sans grande valeur gustative.
On glisse des filets, des darnes de poisson, des poissons d’importation !! Le pin’s était destiné aux poissons nobles, aux pièces d’exception , comme pour la boucherie avec leurs bête de concours à qui ils décernent un prix !
on voit sur certains étalages des chinchards, des vieilles pinsés !! Même de superbe qualité, cela n’a rien à voir avec ça . Le pin’s était destiné aux poissons entiers… pas des filets de merlu ou de julienne même de ligne !! Pourquoi pinser des morceaux d’ailes de raie, pourquoi pinser des darnes, des dos??? Par ce geste, on désacralise ce petit bout de plastique !!! Et oui un petit bout de plastique alors que certains poissonniers se « battent » contre le plastique à coup de campagne publicitaire , enfin c’est une autre histoire …
Voilà la dérive qui court comme un cheval au galop… C’est un exemple parmi tant d’autre.
Pas besoin de vous présenter la société DELPIERRE, un industriel qui est leader dans le libre-service marée et saurisserie et qui surf sur les produits MSC depuis très longtemps, ce label qui donne bonne conscience aux industriels de la transformation. Mais ça aussi c’est une autre histoire…
Donc toujours dans la frénésie du pin’s, ce groupe à donc pris le pas. Essayons de suivre leur raisonnement. Non content d’être leader dans leur secteur du libre-service marée, pourquoi ne pas s’engouffrer sur le marché de la marée traditionnelle. Et quoi de mieux que les pin’s pour valoriser un produit qui ne l’ai pas. Je m’explique.
Prenons la première vente des poissonneries de l’hexagone, le cabillaud. L’industriel a commencé à commercialiser son cabillaud transformé pinsé, en frais, en salé…
On voit un pin’s « BleuBlancRouge » du moins c’est ce que le consommateur voit en premier. Ce qui entraine l’impulsion d’achat et c’est bien normal. Consommer un produit français est dans l’air du temps. Mais en fin de compte c’est un poisson qui se pêche très loin de nos côtes françaises. Pour exemple les filets de morue salées, le cabillaud est un Gadus macrocephalus péché en Océan Pacifique. Donc lorsque l’on se penche vraiment sur le produit rien à voir avec un produit français, mais cela c’est bien noté au dos du pin’s, donc vis à vis de la loi, ils sont en parfaite légalité. Il est transformé en France. Mais point de vue étique, et du point de vue du poissonnier qui vend ce produit, c’est limite. Le consommateur achète un produit avec un pin’s français.
Attention, je ne fais pas de procès à DELPIERRE, je mets juste en lumière la dérive de ce genre de processus qui induit en erreur le consommateur et qui fait les bonnes affaires des poissonniers, et en premier de la grandes distribution mais là où c’est plus grave c’est que même les poissonneries indépendantes se sont engouffrées dans ce processus. Je trouve cela dommage.
Donc le pin’s est devenu du pure marketing, cela envahi les étals des poissonneries traditionnels et des grandes surfaces. Certains étals en sont gavé. Cela ne veut plus rien dire. J’ai même vu des groupes pinser du cabillaud refresh « saumuré comme ils disent », des poissons d’importation avec leur logo « produit sélectionné par nous » lolll. Alors que penser de tout cela? Aucune lisibilité, car trop de pin’s tue le pin’s.
Le PIN’S ne vaudra bientôt plus rien. On ne distinguera bientôt plus un produit d’exception avec un autre. On ne distinguera bientôt plus un poisson issus d’un processus IKEJIME, d’un produit de chalut pourvu qu’il ai été sélectionné par tel ou tel acteur de la filière! Comme pour son habitude le français se brûle les ailes (et pas seulement de raie …;))…
Affaire à suivre…
Très bon article et d’accord avec toi.